mardi 13 février 2024

POUR LE DÉVELOPPEMENT CULTUREL, POUR LA CRÉATION ET LA LIBERTÉ DES ARTISTES DU MONDE ENTIER


Plus que jamais - dans un climat international fait de violences, d’exactions, de barbarie et de non-droits - le besoin de culture, de rencontres avec les artistes et avec les œuvres est une nécessité pour toutes et tous. Plus que jamais nous avons besoin d’écouter, de nous écouter, de parler, de nous parler, de mettre des langages et des esthétiques artistiques en partage, qui portent la voix de l’humanisme, du dialogue , de la multi-culturalité, de la justice et de la Paix, qui nous donnent à penser par nous-mêmes et avec les autres. 
 
Dans ce contexte, et de manière asymétrique en fonction de la géopolitique et des intérêts politiques en France, en Europe et ailleurs, on
tente de nous imposer avec la complicité de nombreux médias un discours unilatéral pernicieux, clivant et dangereux, qui s’accompagne de mesures d’intimidation envers les personnes qui expriment des opinions non conformes, qu’elles soient femmes ou hommes politiques, sportifs, porte-paroles d’associations, syndicalistes, journalistes indépendants. 
 
Nous demandons le respect de la parole portant sur la défense des exilés, des personnes déplacées, victimes d’Apartheid, de la colonisation ou de massacres civils quotidiens, le respect de la parole de tous ceux qui s’opposent à la déshumanisation et à l’impunité des crimes. 
 
Il en est de même du cadre d’acceptation des œuvres et des artistes français et étrangers, parfois empêchés de circuler, d’être accueillis, d’accueillir (refus de visa, tentatives de boycott ou d’embargo, manifestations hostiles…) parce qu’il ne serait pas, pour les gouvernants, « du bon côté du conflit ». 
Donnons-en deux exemples : 
  • La Salle de l'Heure Bleue de Saint Martin d’Hères doit accueillir, le 21 mars prochain, le spectacle « Les Basketteuses de Bamako » de la Cie Thomas Guérineau dans le cadre des Détours de Babel. Les artistes (maliennes) du projet n'ont pas pu se rendre en France pour les 6 semaines de travail prévues en 2023. Thomas Guérineau a pu se rendre sur place pour maintenir le processus mais la situation est extrêmement tendue pour la suite. Aussi, nous en appelons à l'interpellation des pouvoirs publics afin de permettre la délivrance de ces papiers et que l'ouverture de nos frontières puisse se faire sans peine. Cela fait suite aux annonces du ministère de la Culture demandant de cesser toute collaboration avec les artistes du Mali, Niger et Burkina Faso, jugés comme indésirables. 
  • Alors qu’elle devait recevoir le prix 2023 lors de la nouvelle édition de la Foire du livre de Francfort, (18 – 22 octobre), l’autrice palestinienne Adania Shibli, a appris qu’elle ne verrait pas sa récompense de si tôt : la décision de l’annulation de sa remise a été dénoncée par plus de 600 écrivain-es dont trois prix Nobel de littérature. 
Nous dénonçons ce climat inquisiteur et pesant qui s’installe au moment même où le besoin d’affirmation de la liberté d’expression, des droits humains et de l’application du droit international se fait si criant. 
 
En plus de ces sanctions ou interdits, le contexte actuel est économiquement fragile, les établissements culturels étant confrontés à de nombreuses difficultés suite à des hausses importantes des frais de leurs structures, s’agissant des coûts des énergies et des autres produits nécessaires aux spectacles programmés : ateliers de décors, costumes, locaux techniques… Dans le même temps, les subventions des collectivités diminuent, menaçant emplois permanents et intermittents. Autant d’obstacles à la création artistique. 
 
Pour conclure : 
 
Le collectif Culture 38 ne peut qu’être opposé à ce qui ressemble fort à de nouvelles tentatives opportunistes de restriction des libertés des artistes et de la création. Sans ces libertés, il n’y a pas d’accès libre pour toutes et tous aux œuvres anciennes ou contemporaines. Parallèlement, le collectif Culture 38 plaide pour le rétablissement et l’amélioration des subventions et des moyens mis à disposition de la culture qui est essentielle à la vie de chacun. 
 
Le Collectif Culture-38 appelle de ses vœux la fin des conflits meurtriers qui ensanglantent notre planète. Ils ne doivent en aucun cas être des instruments de restriction de nos conquêtes émancipatrices, citoyennes, sociales et de nos libertés publiques. Culture-38 rejette toute tentative de mise au pas des artistes, des créateurs, des institutions culturelles. L’Art est avant tout un pont entre tous les humains. 
 
Premiers signataires 
  • Luc Boucris, 
  • Marie-Odile Boucris, 
  • Béatrice Garnier (Adjointe Développement culturel - ville d’Eybens),
  • Claudine Kahane (Adjointe Affaires culturelles – ville de Saint-Martin-d’Hères), 
  • Jean-Claude Lamarche (responsable des pages Culture du Travailleur Alpin), 
  • Jacqueline Madrennes (Adjointe Éducation-Culture - ville d’Échirolles),
  • Isabelle Métral, 
  • Isabelle Miroglio (Adjointe déléguée action culturelle, vie associative et événementiel - ville de La Tronche), 
  • Édouard Schoene (militant syndical et associatif), 
  • Sylvie Truc 
 
2 novembre 2023

lundi 14 novembre 2022

Adresse de Culture 38 sur la délibération votée en Conseil métropolitain le 30 septembre 2022

Adresse de Culture 38 aux conseillers métropolitains

et aux élus en charge des questions culturelles des 49 communes de la Métropole

à propos de la délibération votée au Conseil Métropolitain

CULTURE, ÉDUCATION ET PARTICIPATION CITOYENNE

Militants au service de l’action publique culturelle, acteurs de la vie culturelle, adjoints à la culture et directeurs des affaires culturelles de communes de la banlieue grenobloise, réunis au sein du collectif Culture38, nous souhaitons vous faire part de nos réflexions suite au vote, le 30 septembre 2022, de la Délibération cadre relative au projet culturel métropolitain. 
 
La démarche initiée par la Métropole pour « réinterroger ses enjeux et ses moyens d’action en matière de culture, afin de porter une vision de la politique culturelle métropolitaine, et de préciser ses objectifs et ses actions prioritaires » nous a semblé tout à fait pertinente. 
 
Sa première concrétisation, par les rencontres, organisées tout au long de l’année 2021, réunissant élus et agents municipaux en charge des questions culturelles des 49 communes métropolitaines, acteurs culturels du territoire, et représentants de la société civile, a lancé une dynamique très prometteuse, largement décrite dans la délibération cadre, sur des objectifs de politique culturelle que nous partageons : 
 
► Favoriser des dynamiques de coopération et de solidarité territoriales. 
► Participer à la démocratisation culturelle et à la mise en œuvre des droits culturels. 
► Soutenir la création artistique, sans cependant être prescriptif. 
 
La deuxième concrétisation, que constitue le vote de la délibération cadre, nous paraît aussi une étape importante, mais nous souhaitons souligner qu’elle ne doit surtout pas être considérée comme un point d’arrivée, mais au contraire comme un point de départ et un point d’appui pour une dynamique qui doit se construire et s’amplifier à partir des besoins et des projets émanant des territoires pour « Faire culture commune ». 
 
Les deux axes stratégiques du projet culturel métropolitain : 
 
► favoriser l’accès aux pratiques culturelles, l’engagement citoyen et la prise en compte des transitions environnementales et sociétales ; 
► faciliter l’interconnaissance, la coordination et la coopération entre les acteurs culturels du territoire (professionnels, amateurs, communes, Métropole) ; 
 
doivent permettre de proposer et construire, depuis nos territoires, des coopérations entre bassins de vie ou bassins d’intérêts, à partir d’enjeux communs et de mettre en synergie les élu.e.s, les professionnels des équipements (dont les équipements métropolitains), les opérateurs culturels et associatifs, les habitant.e.s à travers les pratiques en amateur. 
 
Pour cela il est indispensable que les orientations politiques exprimées dans cette délibération puissent se concrétiser par des engagements effectifs à soutenir, aider, encourager cette dynamique. 
 
Les modalités de cet accompagnement métropolitain sont à imaginer, proposer et construire collectivement, dans une démarche qui doit partir des besoins des territoires, mais qui ne pourra pas se concrétiser sans un dispositif de soutien logistique et une méthodologie portés au niveau métropolitain. 
 
Le contexte actuel, qui place les collectivités territoriales dans des difficultés budgétaires sans précédent, ne rend que plus indispensables les démarches collectives de réflexion, mutualisation, solidarité et osons le dire, de mobilisations, pour sauvegarder le bien commun essentiel qu’est la culture ! 
 
Annexe 
 
Quelques exemples de soutiens logistiques et financiers qui pourraient être mis en œuvre lors de ce mandat 
 
► Organiser un forum pour favoriser la connaissance des projets, des thèmes repérés par les communes et connaître les projets, les actions culturelles, vivier de propositions ou de possibilités artistiques portées par les acteurs culturels 
 
► À partir de ces temps de rencontre en forum et en ateliers, envisager et construire les coopérations entre bassins de vie ou bassins d’intérêt. 
 
► Caler un agenda pour favoriser les liens entre les acteurs culturels (dont les responsables d’équipements métropolitains), les acteurs de l’éducation populaire pour élargir l’écosystème et structurer les projets. 
 
► Accompagnement de la Métropole sur les appels à projets avec soutien logistique (Contrat de Ville, politique de la Ville, communication, recherche de financements, voire aussi avec les tutelles DRAC/CD via les équipements culturels impliqués…). 
 
► Soutien aux valorisations, aux restitutions, aux parrainages entre communes, à l’événementiel.

jeudi 6 mai 2021

Présentation du collectif Culture 38

Le collectif « Culture 38 » est né en 2016 autour d’un appel intitulé « Mobiliser tous les actrices et acteurs de la culture, pour refonder et développer l’engagement des collectivités »
Composé d’élus-es de collectivités locales, de militants de la culture, le collectif a recueilli autour du texte fondateur une centaine de signatures. En 2016 nous avons apporté notre contribution au débat qui se menait sur le territoire métropolitain grenoblois sur la compétence culturelle de la « Métro » 
En 2019 nous avons engagé, sur le territoire d’Echirolles, une série de rencontres avec les acteurs culturels-artistiques associatifs et institutionnels. L’objectif était celui de dégager les questions qui se posent pour le développement culturel sur un territoire, les pistes empruntées par les acteurs. 
En octobre 2020 Culture 38 s’est adressé à l’ensemble des élus Métropolitains pour leur demander d’engager leur mandat avec une nouvelle ambition culturelle, qui mette en avant, par des moyens appropriés la coopération intercommunale. Un dialogue fructueux s’est engagé avec le vice président en charge de la culture. 
En 2021 ce travail se poursuit, sur le territoire de St Martin d’Hères, dans une période de crise sanitaire, sociale, politique où nous jugeons que la culture est ESSENTIELLE. Nous avons porté auprès de la METRO et de quelques collectivités locales, début 2021, la proposition de vote de vœux qui réaffirment cette exigence en demandant que le pouvoir central écoute les demandes de réouverture rapide de tous les lieux culturels, dans le respect des règles sanitaires. 

Des dialogues de réflexion et d’actions sont menés par Culture 38 avec les élus à la culture, avec les organisations syndicales en lutte, avec des partenaires comme « le parlement culturel ». Ils vont s’élargir et se prolonger. 

Le collectif d’animation de culture 38 Luc Boucris, Marie-Odile Boucris, Brice Di Gennaro, Béatrice Garnier, Claudine Kahane, Jean-Claude Lamarche, Jacqueline Madrennes, Isabelle Métral, Dominique Scheiblin, Édouard Schoene, Cosima Semoun, Sylvie Truc,

jeudi 29 avril 2021

LA COOPÉRATION CULTURELLE ENTRE LES COMMUNES : AU CŒUR DES MISSIONS DE LA MÉTROPOLE

 Les élu-es métropolitain-es ont décidé, lors de la prise de la compétence culturelle, effective au 1er janvier 2017, trois objectifs en la matière : « affirmer l’identité culturelle de la métropole ; renforcer son rayonnement et son attractivité ; favoriser le développement social du territoire ».

Parmi les six « axes d’intervention » définis pour atteindre ces objectifs, il en est un en particulier qui demande à être plus fortement soutenu : la coopération culturelle intercommunale.

En effet, au sein des communes, des efforts considérables sont déployés pour développer des liens et des pratiques culturelles avec les habitant-es et leur permettre de découvrir de multiples savoirs et de multiples formes artistiques. Malgré la baisse des moyens financiers des municipalités au cours de ces dernières années, qui a conduit à des arbitrages douloureux, ces missions essentielles sont menées avec une très grande énergie, tant dans le cadre d’institutions relevant directement des communes que par les associations qu’elles soutiennent. Sont ainsi mis en œuvre des compétences, des ressources, des dispositifs d’une grande créativité et d’une grande richesse.

Manquent par contre des outils communs, à même de permettre le partage de cette richesse, et de soutenir et développer ce foisonnement d’initiatives, en favorisant les collaborations et en accroissant l’intelligence collective et la compétence de tous les acteurs.

La Métropole est d’évidence le juste niveau pour apporter le soutien logistique nécessaire à cette coopération.

En effet, des programmes de coopération culturelle sont déjà en cours dans le cadre de la Politique de la ville et la numothèque,  « pôle de ressources numériques » coopératif a été créée.

Mais la concrétisation d’une coopération culturelle est nécessaire, de façon beaucoup plus globale, sur l’ensemble du territoire, au-delà des quartiers labellisés « Politique de la ville » ; cela correspond d’ailleurs pleinement à l’axe d’intervention « coopération culturelle », ainsi défini sur le site de la Métropole : « La coopération culturelle, pour un meilleur déploiement de l’offre culturelle sur le territoire et auprès de tous les publics ». Sachant qu’il s’agit bien sûr de l’accès aux savoirs et aux diverses formes artistiques, mais aussi du développement de la créativité des personnes, le terme « offre » devant être compris dans ces deux sens.

Par ailleurs, la délibération cadre  du 3 novembre 2016 du « projet culturel métropolitain » fait référence aux   «  mutualisations et mises en réseaux, à la coordination  des acteurs », ou encore à « la mise en commun de moyens d’ingénierie ».

Les outils prioritaires le plus fortement attendus, pour permettre cette coopération, sont :

·         La création et la gestion d’un site dédié, comportant un annuaire des structures, un annuaire des intervenants potentiels par domaines, des ressources de formation, des fonds ressource spécialisés (vidéo, etc.), un calendrier des actions, projets, spectacles, un ensemble de compte-rendus d’expériences, un forum. Ce site serait alimenté par les diverses structures, mais il faut, au-delà de la création du site, un temps régulier de travail pour sa gestion et sa mise à jour régulière.

·         La gestion d’un planning de réunions, qui pourrait se faire dans le cadre de ce site internet. Outre l’échange et l’information par le biais d’un site, le besoin d’échanges directs est ressenti. Ces réunions ne pourraient être fréquentes, eu égard à la charge de travail de tous, mais démultiplieraient l’action de chacun, seraient source de nouvelles coopérations, de nouvelles initiatives.

·         Une aide à la recherche de financements pour des projets intercommunaux. Les communes, les acteurs culturels n’ont pas les moyens humains ni les compétences transverses intercommunales pour monter et suivre de tels dossiers.

·         Un dispositif favorisant le « retour » d’artistes formés au niveau des communes pour mener à leur tour des actions auprès des habitants.

·         Une aide au financement de résidences d’artistes axées sur le travail avec les habitants, sur une durée suffisamment longue (un an) pour qu’elles s’inscrivent véritablement dans le territoire.

·         La coordination de  l’action Vive les vacances , pour en faire un dispositif   plus collaboratif.

Ces outils coopératifs laisseraient aux acteurs culturels au sein des communes la pleine initiative des projets, tout en leur conférant un impact beaucoup plus large et en leur ouvrant de nouvelles possibilités.

Leur mise en place répondrait pleinement à un objectif premier de la création des Métropoles : favoriser le déploiement des potentialités de chaque commune, et démultiplier leur action par la collaboration.

Ils ne seraient nullement en contradiction avec le travail de contractualisation déjà en cours avec douze institutions culturelles de la Métropole : les actions des plus grandes institutions et celles des acteurs culturels à l'échelle des communes se complètent et s'imbriquent sans concurrence. L'échelle est différente et donc la méthode aussi ; l'efficacité et la richesse des interactions entre les communes procèdent de la souplesse et de l'horizontalité d'un modèle coopératif, auquel l'instance Métropole peut et doit apporter un soutien logistique.

La culture est fondamentale en démocratie pour l’exercice de la citoyenneté et le déploiement des talents de chaque individu. En conséquence, la Métropole doit mettre au premier plan de son action, en particulier par le soutien au travail culturel mené par les communes au plus près des habitants, tout ce qui favorise les pratiques démocratiques et les capacités créatives de sa population.

 

 

Culture 38 oct 2020

mercredi 2 novembre 2016

Contribution à la réflexion et au débat sur le projet de délibération sur la compétence culturelle qui sera soumis au vote du conseil métropolitain

A Mesdames, Messieurs le Maires des communes de la métropole grenobloise,
A Mesdames les Directrices et Messieurs les Directeurs des affaires culturelles,
 Contribution à la réflexion et au débat sur le projet de délibération sur la compétence culturelle qui sera soumis au vote du conseil métropolitain le 3 novembre
Grenoble, le 28 octobre 2016 
 Mesdames, Messieurs les Maires,

Ayant participé de façons diverses, comme annoncé dans notre précédente missive en avril dernier, à la phase de concertation préalable à l’établissement du texte qui nous est soumis par la présidence, nous vous adressons les réflexions et propositions qu’il nous inspire.
    De ce projet de délibération nous disons qu’il est décevant en regard des échanges qui ont eu lieu dans la phase de concertation. Inventaire à la Prévert, fourre-tout, il est une juxtaposition de réflexions parfois intéressantes mais menées de manière cloisonnée. Nous sommes bien conscients que la compétence culturelle ne peut s’opérer que de façon progressive ; mais cela requiert justement de dégager au départ une vision politique clairement identifiée et structurante pour des perspectives culturelles métropolitaines ambitieuses et novatrices.
    Ce que le texte ne fait nullement puisqu’il propose dans l’immédiat, sans aucune autre réflexion d’ensemble, comme premier pas, le transfert de la MC2 et de l’Hexagone. Quelle en est la logique ? S'agit-il d'avoir à proposer quelque chose à minima avec une loi MAPTAM qui se réfère exclusivement aux équipements, alors même que cette approche est dénoncée depuis le début par de nombreux élus ? L'incompréhension autour de ces transferts vient bien de l'absence totale de mise en perspective, laquelle impliquerait à tout le moins une réflexion sur les autres lieux ressources qui œuvrent sur les champs de l'action culturelle dans la métropole. « Tout ça pour ça » aurait-on envie de dire…
C’est dès maintenant que doit émerger un schéma directeur des actions culturelles autour d'axes politiques lisibles structurant la construction métropolitaine à venir de cette compétence. 
 Pour contribuer à la réflexion nous proposons quatre axes structurants:
1- Le soutien à la création, cadre d'une nouvelle façon de se rencontrer, de participer, de se former, d'apprendre
Dans un contexte financier difficile, l'insuffisant pouvoir d'achat des scènes pénalise un peu la création et les responsables de programmation préfèrent légitimement en conséquence se tourner vers la diffusion de propositions reconnues qui consolident les équilibres financiers fragiles de leurs équipements. Notre territoire métropolitain a toujours été le siège d'un bouillonnement culturel important reliant animation et création à travers une affirmation esthétique exigeante et populaire. Peuple et Culture lié à l'histoire des Maquis du Vercors, première expérience de décentralisation culturelle avec Jean Dasté, militants de l'Education populaire et amis des arts, l'ACTA (l'Action Culturelle par le théâtre et les Arts) puis la Comédie des Alpes sont des ancrages majeurs de l'histoire culturelle de notre territoire métropolitain.
Que serait la dynamique culturelle métropolitaine, que seraient nos équipements, nos scènes et nos événements sans le foisonnement de propositions, sans l'expérimentation, la recherche de nouveaux langages et de nouvelles formes esthétiques?
La place de la création dans la métropole peut être réfléchie selon des modalités ou relais divers : depuis les équipements existants, à partir d'un « lieu »de fabrique dédié (pas forcément matériel), par des résidences d'artistes, dans une contractualisation entre les équipements et les communes (pas seulement celles où ils sont implantés), avec d'autres réseaux impliquant les festivals et les scènes nationales, européennes. Il est essentiel que le soutien à la création soit un axe organisant notre dynamique culturelle à l'échelle de la métro.
Ce soutien métropolitain à la création devra nécessairement et parallèlement s’accompagner d’aides à des actions d'éducation, de pratiques et de médiations susceptibles de relier les publics en particulier les plus éloignés des champs de l'action artistique et culturelle.
Ce double soutien doit aussi viser à remédier autant que possible aux inégalités qui existent actuellement entre les diverses communes. Il suppose une étroite concertation entre les communes et la Métro afin que celle-ci encourage les coopérations et les mutualisations mutuellement bénéfiques.
2 - Histoire ouvrière, multiculturalisme, sciences et techniques, une mémoire qui mise sur le lien, la rencontre et par là-même à un mutuel enrichissement 
Notre histoire métropolitaine est liée à la venue de nombreuses populations ouvrières aux origines diverses construisant tout au long du 20ème siècle notre identité multiculturelle. La recherche d'un travail, d'une vie meilleure en sont le cadre avec les débuts de l'industrialisation, les découvertes scientifiques et techniques que notre situation géographique, avec l'énergie hydraulique, va contribuer à développer massivement (chimie, papeterie, tissage, tannerie, viscose...)
L'ancrage de plusieurs cultures a été et doit rester une richesse. Notre histoire métropolitaine est structurée par cette citoyenneté ouvrière, qui interroge notre identité présente et future, notre imaginaire collectif (transmission, identification, sentiment d'appartenance...), histoire qui nourrit notre capacité à construire des perspectives communes.
L'histoire contemporaine récente, celle des technologies nouvelles dans notre territoire, fait bien sûr partie de cet axe muséal. Pas question d’opposer les unes aux autres !
Tel est selon nous, dans toutes ses riches dimensions, l’axe muséal qui doit être porté et soutenu par la métropole.
 3 - Lecture publique, la force des réseaux 
 De nombreuses bibliothèques se sont regroupées en réseau. Leurs histoires récentes ou plus anciennes sont différentes. Elles leur permettent de se construire une culture commune pour mieux développer la lecture publique et le service aux populations, de renforcer l'harmonisation des pratiques, de travailler sur une politique documentaire concertée, de renforcer la culture professionnelle des personnels.
L'évolution numérique amène de nouveaux défis aux professionnels, confrontés toujours plus à la nécessaire maîtrise des systèmes d'information, laquelle questionne l'indépendance, le pluralisme, la liberté au cœur de leur mission d'intérêt public, notamment de consolider l’esprit critique et le lien social.
Une coordination des réseaux existants constituerait une force supplémentaire au service d'une dynamique de réflexion qui s'attache à mettre en œuvre une politique de lecture publique partagée et forte à l'échelle métropolitaine.
4 - S’agissant de l’enseignement musical
Il s’agit pour la Métropole de se doter d’une politique d’enseignement musical en complémentarité avec la compétence du Département dont celui-ci ne souhaite pas se défaire. Il est souhaitable de concevoir une articulation entre les différents équipements d’enseignement artistique de l’agglo dont certains fonctionnent déjà en réseau en partie grâce à l’action de Conseil départemental et à son schéma des enseignements artistiques, schéma fonctionnel depuis longtemps. Il serait avantageux de faciliter un travail en réseau entre écoles, conservatoires, notamment pour les enseignements rares dont les enseignants interviennent en plusieurs lieux, qui n’auraient plus qu’un seul employeur.
Plus généralement, les dispositifs et actions d’éducation artistique et culturelle devront bien sûr être valorisés.
Voilà donc définis quelques axes structurants qui donneraient dès maintenant à l’engagement métropolitain en matière de culture une base riche de sens et dynamisante. Et qui permettrait ultérieurement d’en construire le développement au plus près des besoins des populations des communes dans un esprit de coopération et d’enrichissement mutuel. 
Engagement qui pourrait être affirmé dans une « Charte de coopération » en guise de préambule, garante d’une gouvernance partagée avec les communes. 

De nombreuses contributions entendues au long des réunions de concertations de ce printemps font référence aux axes développés ci-dessus, sans déboucher sur une vision métropolitaine rassembleuse et lisible. Ils peuvent constituer le socle d’une perspective et d’une décision culturelle fondatrice dont l’écho, nous n’en doutons pas, contribuerait singulièrement, au propre comme au figuré, à « l’image de la Métropole ». 
Autre façon, peut-être, d’en concevoir « l’attractivité ».
En vous remerciant par avance de vos retours et avis nous vous adressons nos cordiales salutations.
Les initiateurs de l’appel culture 38

jeudi 7 juillet 2016

Lettre aux signataires pour une ambition culturelle au plus près du terrain, et des financements à la hauteur de cette ambition.

Chers amis, 
Trois mois se sont écoulés depuis notre dernier courrier : il s’agissait, courant avril, de vous faire part de la lettre que nous venions d’envoyer par courrier à tous les maires et adjoints à la culture des 49 communes de la Métro ainsi qu’à tous les élus communautaires (voir ici)
Nous avions en effet à cette date, suite à des contacts avec différents « acteurs culturels », élus et agents territoriaux des services culturels, cerné ce qui nous paraissait être les principales problématiques concernant la définition de la compétence métropolitaine en matière de culture. 
Cette question, il est peut-être utile de le préciser, doit être tranchée par un vote du conseil communautaire d’ici la fin de l’année 2016 (faute de quoi ce serait l’ensemble des équipements culturels et socio-culturels qui seraient transférés à la métropole). Il était urgent d’informer les politiques de nos interrogations et de nos attentes afin de contribuer à percevoir et partager les enjeux. 
Calendrier de consultation réduit, absence de consultation des adjoints-tes à la culture des communes, et donc absence de vision politique concernant la culture, réduite le plus souvent à la simple notion d’attractivité du territoire, démarche technocratique prédominante puisqu’associant essentiellement les techniciens des collectivités – intervenant sans orientations politiques concertées avec les élus -es -, budget réduit au « produit » total des transferts, absence de prise en compte de la grande inégalité entre les communes… 
Parallèlement émergent : les exigences légitimes des communes en matière d’action culturelle, de maillage du territoire…. ou le nécessaire soutien à la création, aux réseaux de coopération. 
Nos préoccupations ont été entendues si l’on en juge par les questions posées dans les réunions de concertation qui ont eu lieu depuis. Et par les retours de ceux que nous avons interrogés quant à l’utilité de notre démarche. 
Nous pensons aussi que la Métro, en la personne de son président, a pris note de l’exigence, formulée dans notre lettre et reprise dans ces réunions, de la concertation avec les élus communaux, ainsi que de certaines thématiques dont notre courrier, communiqué aussi aux acteurs culturels, a d’ailleurs encouragé la prise en compte et la discussion. 
Parallèlement à notre présence dans ces instances chaque fois que nous en avons eu connaissance, nous avons rencontré le Collectif métropolitain des acteurs culturels, qui regroupe un grand nombre de lieux, institutions, compagnies, et avons eu la satisfaction de voir nos analyses appréciées, partagées, et considérées comme un appui précieux dans les mois qui viennent. 
La consultation va prendre fin le 8 juillet et donnera lieu le 12 juillet à une restitution et un débat au Stade des Alpes, de 17 à 20h. (accès sur inscription, sur le site : http://participation.lametro.fr/events/restitution-de-la-concertation-culture-et-sport
Une délibération sera proposée au conseil métropolitain à l’automne. 
Notre démarche d’ici-là doit faire apparaître le maximum de convergences possibles, pour que soit définie une ambition culturelle au plus près du terrain, et des financements à la hauteur de cette ambition. 
Nous vous invitons à nous communiquer les informations, points de vue, qui permettront de nourrir la réflexion de notre groupe. Nous vous proposerons une réunion afin de définir quelles initiatives publiques il conviendra de prendre.

mardi 26 avril 2016

En pleine confrontation sociale, les intermittents du spectacle sont-ils des "privilégiés" ?

EN PLEINE CONFRONTATION SOCIALE
Les intermittents du spectacle sont-ils des « privilégiés »?
série d'articles publié par l’HUMANITE débats &controverses du 26 avril 2016
 
POUR UNE VRAIE SÉCURITÉ SOCIALE PROFESSIONNELLE par Angeline Barth Secrétaire générale adjointe de la fédération CGT spectacle

Si l'on en revient au sens premier du terme, les artistes et technicien-ne-s du spectacle bénéficient bien du privilège (privata lex) d'une loi particulière, leur permettant de bénéficier de conditions spécifiques d'indemnisation par l'assurance chômage, mais également d'adaptation à leurs spécificités d'emploi des règles concernant la formation professionnelle, la prévoyance, la santé, la médecine du travail... Ils et elles ont également le privilège d'exercer des métiers passions, de travailler dans un secteur attractif, et pour les rares plus chanceux-ses, de pouvoir choisir les projets sur lesquels ils et elles travaillent. Mais est-ce que cela en fait pour autant des « privilégié-e-s », au sens commun du terme ? Celles et ceux sur lesquels la presse libérale jette régulièrement l'opprobre : intermittent-e-s, fonctionnaires, cheminot-e-s, salarié-e-s d'EDF, (future-s) retraité-e-s bénéficiant d'un régime spécial... Celles et ceux dont on regarde avec envie les particularités comme une injustice, sans voir la partie immergée de l'iceberg.

Les artistes et technicien-ne-s du spectacle alternent des périodes d'emploi et des périodes de chômage. Elles et ils travaillent dans un secteur dans lequel il est « d'usage » de ne pas recourir au CDI, sous réserve que leur emploi relève bien d'une activité temporaire et non de l'activité permanente de l'entreprise. Plus de 120 000 salarié-e-s sont en CDI, contre plus de 250 000 ayant cotisé à Pôle emploi au titre des annexes 8 et 10. Moins d'un-e salarié-e intermittent-e sur deux est indemnisé-e au titre des annexes 8 et 10.

Une étude du Céreq sur la pluriactivité dans le spectacle vivant montre qu'en moyenne les salarié-e-s y travaillent moins de 463 heures annuelles, pour des revenus, 6 928 euros nets, et que seulement 30 % des salarié-e-s tirent l'essentiel de leurs revenus du secteur.
L'insécurité de l'emploi est très forte, la durée moyenne des contrats de travail est de trois jours et les salaires doivent être renégociés à chaque contrat de travail. Ils peuvent même diminuer : ainsi, la rémunération horaire moyenne des artistes dans le champ du spectacle subventionné est passée de 18 euros à 15 euros bruts en cinq ans. Plus de 90 % des entreprises du spectacle vivant et de l'audiovisuel comptent moins de 10 salariés et n'ont pas de représentants du personnel. Les artistes et technicienne-s ont donc très peu de moyens pour se défendre, et la menace de se faire blacklister par des employeurs peu scrupuleux du dialogue social est très présente.

Les femmes artistes et les techniciennes évoluent, quant à elles, dans un milieu misogyne qui n'échappe pas aux clichés de la société : un tiers des techniciens sont des femmes et la même proportion des salariés travaillant dans l'administration sont des hommes. Seuls 30% des intermittents sont des femmes.
Les comédiennes sont confrontées à la raréfaction des rôles de femmes après la quarantaine. Pour les femmes enceintes, il est extrêmement ardu d'atteindre le nombre d'heures requis pour bénéficier des allocations journalières de la Sécurité sociale et elles subissent la double peine en éprouvant de grandes difficultés à redevenir bénéficiaires du régime d'assurance chômage. Au-delà du sexisme « ordinaire » s'ajoutent des sujets tabous: le harcèlement et les pressions sexuelles liées à l'obtention d'un travail, d'une production ou d'un rôle...
Cet inventaire à la Prévert démontre bien que le terme « privilégié » n'est pas le plus approprié pour caractériser les artistes et technicien-ne-s du spectacle. L'emploi ne cesse de se précariser dans notre société, et au-delà des intermittent-e-s, nous devons continuer à défendre les salarié-e-s les plus fragiles en construisant des droits nouveaux pour toutes et tous, attachés à la personne et garantis collectivement. Une vraie sécurité sociale professionnelle. Gagner le nouveau statut du travail salarié que défend la CGT.